Le suspense est à son comble au Palais du Peuple. Ce jeudi 22 mai marque un tournant décisif dans l’affaire qui tient la République en haleine : la Commission spéciale du Sénat s’apprête à « enfanter » son rapport crucial sur la levée des immunités et l’autorisation des poursuites contre le sénateur à vie Joseph Kabila Kabange. Une échéance attendue de pied ferme, qui pourrait bien redessiner le paysage politique et judiciaire congolais.
Convoqués en plénière, les sénateurs auront entre leurs mains le fruit de 72 heures de travail intense mené par la commission de 40 membres, présidée par Christophe Lutundula. Cette instance ad hoc avait pour mission d’examiner le réquisitoire de l’auditeur général près la Haute Cour Militaire, qui souhaite voir l’ancien chef de l’État répondre de graves accusations.
Le « Fantôme » du M23 et la Trahison en Question
Le réquisitoire, dont la lecture avait déjà fait grand bruit lors de la dernière plénière, est accablant. Joseph Kabila Kabange est accusé de participation à un mouvement insurrectionnel, notamment en assurant des communications avec les insurgés du M23. Mais l’épée de Damoclès la plus lourde est sans doute celle de la trahison, pour avoir entretenu des intelligences avec une puissance étrangère – en l’occurrence le Rwanda – ou ses agents, le mouvement terroriste AFC/M23, dans le but d’engager cette puissance à entreprendre des hostilités contre la RDC. Des faits prévus et punis par des articles du Code pénal militaire et du Code pénal ordinaire, sans oublier la participation à des crimes de guerre.
La commission, avait invité l’auditeur général des FARDC pour de nouvelles précisions, mais aussi le principal intéressé, le sénateur à vie. Cependant, Joseph Kabila a brillé par son absence, ne répondant pas à l’invitation de la Chambre haute du Parlement. Un silence qui, pour certains, en dit long, et pour d’autres, relève d’un droit.
Un Statut de Sénateur au Cœur du Débat Judiciaire. La demande d’autorisation des poursuites se fonde sur un arsenal juridique solide, allant de la Constitution de la RDC aux lois spécifiques sur la justice militaire et le statut des anciens présidents. Un point crucial est souligné par le parquet près la Haute Cour Militaire : la saisine du Sénat se justifie, non pas parce que Joseph Kabila était président de la République, mais parce qu’il est sénateur. C’est son statut actuel qui le place sous la compétence pénale de la Haute Cour Militaire pour les actes infractionnels relevant du Code pénal militaire.
L’opinion publique, déjà chauffée à blanc par les rumeurs et les spéculations, attend avec impatience le rapport de la commission spéciale. Ce jeudi, le Sénat, en tant que gardien des immunités, devra trancher. Le « jugement en gestation » de la commission sera enfin révélé, et avec lui, peut-être, la première pierre d’un procès qui s’annonce historique. Le rideau se lève sur un acte majeur de la vie politique et judiciaire congolaise.
Célestin Botoleande