La « Déclaration de principes » signée à Doha, censée paver la voie à un accord de paix global en RDC, suscite déjà des interprétations divergentes, notamment sur un point crucial : la restauration de l’autorité de l’État dans les zones occupées par l’AFC/M23. Un véritable « chassé-croisé » sémantique se joue entre Kinshasa et la rébellion.
Le Vice-Premier ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, de retour de Doha, a clarifié la position gouvernementale ce lundi 21 juillet. Pour Kinshasa, la restauration de l’autorité de l’État signifie le rétablissement effectif de l’administration publique dans les territoires sous contrôle rebelle. « Il va falloir que nous puissions redéployer l’administration, […] et principalement avec l’attribut de la force publique qui est la police nationale », a-t-il affirmé, évoquant même la nécessité de réinstaller les chefs-lieux provinciaux actuellement délocalisés à Beni (Nord-Kivu) et Uvira (Sud-Kivu). Les étapes précises de ce processus, a-t-il ajouté, seront détaillées lors de la signature de l’accord de paix définitif.
Cependant, le son de cloche est tout autre du côté de l’AFC/M23. Bertrand Bisimwa, coordonnateur adjoint du mouvement, présent lui aussi à Doha, a expliqué que pour eux, il ne s’agit pas d’un simple « retrait », mais plutôt de « mécanismes de capacitation de l’État le rendant à même d’assumer ses prérogatives, obligations ». Une nuance de taille qui pourrait compliquer les négociations à venir.
La Déclaration de principes elle-même reconnaît que la restauration de l’autorité de l’État est une « conséquence logique au règlement efficace des causes du conflit » et un « pilier fondamental de l’accord de paix », lequel définira les modalités et le calendrier de ce processus. Le document évoque également le retour « sûr, volontaire et digne » des déplacés et réfugiés, en conformité avec les accords internationaux et l’assistance du HCR. La MONUSCO et les mécanismes régionaux sont aussi appelés à jouer un rôle dans la protection des civils et la mise en œuvre du cessez-le-feu.
Cette divergence d’interprétation intervient alors que des accusations mutuelles de renforcement militaire persistent sur le terrain, Kinshasa suspectant l’AFC/M23, soutenu par le Rwanda, de vouloir prendre le contrôle d’Uvira. Le chemin vers la paix durable dans le Nord et Sud-Kivu semble encore semé d’embûches, où chaque mot de l’accord sera scruté à la loupe pour éviter que le « retour de flamme » de l’État ne s’éteigne avant d’avoir pleinement éclairé la voie de la réconciliation.
Célestin Botoleande