La 77è session générale de l’Assemblée de l’ONU s’est tenu à New-York aux États-Unis. En suivant les discours et les paradiscours, on en est arrivé à tirer les conclusions ci-après.
- Tous les pays agressés tels que la RD Congo, le Yémen, l’Armenie etc. s’attendaient à voir la prise en compte de leur situation de l’agression du territoire de leur pays par la communauté des nations. Peine perdue ! Tout le débat a été ramené au cas bien particulier de l’Ukraine selon le bon vouloir du maître des céans;
- L’impression générale qui se dégage de cette 77e session de l’ONU est bien la face cachée de cette guerre de l’Ukraine qui en réalité s’avère être le fusible d’une guerre plus large qui pourra ouvrir à une nouvelle ère politique mondiale;
À y regarder de très près, le monde est en pleine mutation. Une mutation un peu plus structurelle et profonde qui change tout le tableau de politique internationale.
Nous sommes en face d’un monde en transition très manifeste, en voie de passer d’un monde unipolaire instauré depuis la chute du Mur de Berlin vers un monde multipolaire.
En écoutant attentivement les discours de la plupart des grands dirigeants du monde, on en a déduit que cette 77e assemblée générale de l’ONU est le reflet de grandes tensions mondiales avec des visions trop diversifiées des dirigeants du monde.
L’annonce du référendum d’autodétermination de nombreuses provinces russophones de l’Ukraine; la démarche de la nouvelle Première ministre britannique pour déplacer l’ambassade de Sa Majesté de Tel Aviv à Jérusalem et son appel à l’effort collectif d’empêcher l’Iran de développer l’arme nucléaire; la demande rocambolesque d’Emmanuel Macron de retirer carrément la Russie du Conseil de sécurité de l’ONU ou encore ces interprétations biaisées des propos de Poutine et ces allusions à peine voilées de Joe Biden au possible usage de l’arme atomique en guise de réponse sont autant de signes de durcissement d’un camp contre l’autre que l’expression de la fracture profonde de la politique internationale.
- Au-delà de ces fractures importantes entre nations émerge aussi l’effondrement du système multilatéral. Ce tiraillement qui prend son point focal dans la guerre en Ukraine met à mal le droit international et l’ordre géopolitique qui ont régi le monde depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Les fondements de ce macrocadre qui amenait à des négociations, à des compromis et à des traités semblent s’écrouler inexorablement. Ceci dit, les grandes puissances sont entrées dans un désaccord total sur l’avenir du monde, sur le respect mutuel des zones d’influence respectives et des frontières traditionnelles régies par la charte des nations;
- La question en lame de fond c’est justement la volonté de maintenir (USA) ou de conquérir (Chine) le leadership mondial et la suprématie sur le reste du monde. Cette rivalité de grandes puissances met à mal le Droit international interprété différemment de par et d’autre au prisme des intérêts individuels.
Cette mutation du monde se conjugue avec la fragmentation de ce dernier. Depuis que les dirigeants américains ont conçu depuis une trentaine d’années une stratégie pour maintenir les USA comme première puissance mondiale du monde, ils ont fait de leur priorité numéro, la politique de pivot vers le Pacifique. Car, il faut coûte que coûte empêcher d’autres puissances ou pôles de puissances telles la Russie ou l’Union Européenne d’émerger et d’occuper l’hégémonie du monde en cassant le nouvel axe eurasiatiaque appuyé par la route de ls Soie, et en désignant la Chine et la Russie comme des ennemis numéro un du monde occidental, les américains croient casser cette dynamique d’un monde multipolaire pour pouvoir maintenir leur première place.
- Ce raz-de-marée touchant la politique internationale et fragmentant l’ordre politique international de cinq continents a pris de court une Europe désemparée, divisée de l’intérieur entre différents pays membres et essoufflée par le déficit du gaz à l’approche de l’hiver 2022.
En manque de politique étrangère précise et d’une puissance de feu propre, l’Union européenne se voit dans l’obligation de s’arrimer sur la politique de l’administration américaine, quand bien même elle le fait en total désaccord avec les partis d’opposition et la majeure partie de leurs électeurs.
A cette assemblée générale de l’ONU, l’on a bien vu l’épée de Damoclès suspendue sur la tête des peuples du monde entier dès lors que le monde s’est privé d’un cadre de consensus où les Chefs d’Etat peuvent encore et encore se concerter pour résoudre les problèmes du monde. C’est douloureux à dire, mais il est clair que ce déficit d’accord minimal a du coup supprimé toute cette ligne rouge que personne n’osait franchir depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Aujourd’hui, tout semble possible, le meilleur comme le pire.
Par Gédéon ATIBU