Un tête-à-tête entre Zelensky et Poutine pourra en toute probabilité avoir lieu dans les prochains jours et ce, sous la médiation du président turc Recip Tayyip Erdogan.
Avant d’y arriver, les pourparlers trilatéraux ont été précédemment organisés avec la participation des présidents turc et ukrainien Recep Tayyip Erdogan, Volodymyr Zelensky et le secrétaire général de l’ONU António Guterres à Lviv vers 17h00′. Des détails techniques ont été en discussion autour de la question de l’échange des prisonniers et du départ des soldats russes du territoire ukrainien.
Comme déjà connu de tous depuis des mois, les sanctions européennes contre la Russie n’ont pas plié Moscou mais ont eu en revanche des retombées contre-productives en grande défaveur des économies de l’UE. À l’approche de l’hiver, la Fédération de Russie continue à vendre son gaz au compte-goutte aux pays de l’OTAN, ce qui risque d’être désastreux au réchauffement des domiciles et facteur de ralentissement des productions des usines européennes. Rien que pour l’Allemagne, une étude des experts a démontré qu’elle ne pourra pas tenir au-delà de deux mois.
Alors quoi? Est-ce là un retour au bon sens? Ou bien l’usage de la realpolitik de la part des membres de l’OTAN? Est-ce un guet-apens tendu aux russes? À mon avis, les trois à la fois. L’important c’est de chercher une sortie honorable à la crise sans pouvoir perdre la face devant l’opinion publique de son pays et devant celle internationale. Mais les attaques militaires de part et d’autre pourront se multiplier ces jours-ci pour aller en position de force à la table des négociations.
Ce qui paraît évident c’est que la plupart des co-belligérants ont en effet compris l’impossibilité pour le gouvernement de Kiev de gagner cette guerre. Les informations alarmantes sur la contrebande des officiers ukrainiens avec les armes livrées par des pays de l’OTAN, le risque d’affaiblissement de nombreux gouvernements européens suite au poids économique écrasant dus aux sanctions contre la Russie, voire le risque d’implosion sociale en Europe suite au coût de vie trop onéreux et de plus en plus insupportable pour le petit peuple et enfin l’incurie du gouvernement ukrainien qui a osé bombarder sa propre centrale nucléaire de Zaporijjia juste pour vouloir noyer son adversaire russe constituent tous là autant de facteurs qui ont fini par exaspérer les alliés de Zelensky. Ce dernier est de plus en plus lâché par ses puissants soutiens.
Ce tête-à-tête diplomatique entre Poutine et Zelensky constitue donc pour le président ukrainien une rencontre de la dernière chance voire la seule issue envisageable, si du moins il tient encore à garder le contrôle sur une partie de son territoire.
Certes, vu la complexité de la crise ukrainienne, des rebondissements ultérieurs ne sont pas à écarter. Mais quoi qu’il arrive, c’est indubitablement le président Erdogan qui est en train de sortir du lot et de se voir ragaillardi sur la scène internationale.
Tout comme il a connu un grand succès diplomatique dans la libération des bateaux de blé bloqués au port d’Odessa, Erdogan est de nouveau en voie de gagner une autre bataille diplomatique, celle de porter à la table de négociations les deux frères ennemis livrés à une guerre fratricide de six mois, avec comme résultat : une Ukraine en lambeaux avec un territoire désormais scindé en deux parties et que même ce futur tête-à-tête ne pourra plus réunifier.
Reste par ailleurs à souligner que le zèle de la Turquie n’est pas sans intérêt. Dans le cas où aboutit à bon escient cette rencontre entre les deux dirigeants russe et ukrainien, Erdogan entrera dans les annales de l’histoire comme un stratège qui a réussi là où beaucoup se sont cassé les dents. L’histoire retiendra que c’est grâce à son leadership que les hostilités en Ukraine auront pris fin. Un prestige diplomatique international indéniable à l’honneur de la Turquie mais surtout de son président qui se prépare à rempiler au prochain scrutin présidentiel de juin 2023.
À ce haut fait d’arme diplomatique, il siège d’ajouter que l’économie de la Turquie pourra être la grande gagnante dans les gros marchés à arracher pour la reconstruction post-conflit de l’Ukraine. Déjà les parties de deux pays ont signé le mémorandum envisageant le projet de restauration par le côté turc du pont du village de Romanovka, région de Kyiv.
Ceci dit, ceux qui n’ont rien oublié de la guerre de l’OTAN en Irak ou en Libye comprennent aisément que désormais ce n’est plus sur la livraison des armes que lorgneront les puissances co-belligérantes mais sur l’effort de guerre leur permettant d’engranger des bénéfices économiques dans la phase post conflit.
Par Gédéon Atibu